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La montée en puissance du mode projet dans les équipes de recherche pluridisciplinaires : revue rapide

La recherche scientifique, particulièrement lorsqu’elle est pluridisciplinaire, implique souvent la gestion de projets complexes qui nécessitent une planification minutieuse, une communication efficace et une collaboration étroite entre les membres de l’équipe. Dans ce contexte, il est de plus en plus courant de passer en “mode projet” pour faciliter la gestion de ces projets et assurer leur réussite. Mais qu’est-ce que cela signifie concrètement et comment cela peut-il aider les équipes de recherche à atteindre leurs objectifs ? C’est ce que nous allons explorer dans cet article.

Le mode projet offre de nombreux avantages pour les équipes de recherche. Il permet de structurer le travail en fixant des objectifs clairs et précis. Cela permet à chaque membre de l’équipe de savoir ce qu’il doit faire et comment sa contribution s’intègre dans l’ensemble du projet. Ensuite, le mode projet permet de mieux gérer les délais et les ressources, en identifiant dès le début les tâches à accomplir et les échéances à respecter. Enfin, le mode projet permet de faciliter la communication et la collaboration entre les membres de l’équipe, en encourageant la transparence et en établissant un cadre formel pour les échanges d’informations.

Pour les équipes pluridisciplinaires en particulier, le mode projet est particulièrement bénéfique car il permet de mieux coordonner les différentes expertises et de tirer parti de la complémentarité des compétences de chaque membre de l’équipe. En effet, la collaboration entre des personnes ayant des formations et des expériences différentes peut être très enrichissante pour la recherche. Le mode projet permet ainsi de favoriser l’émergence d’idées novatrices et de solutions originales en permettant la participation active de chacun dans la conception et la réalisation du projet.

Notons toutefois qu’il existe de nombreux modes de gestion de projet adaptés à différents contextes et objectifs. Chaque équipe de recherche peut ainsi choisir le mode de gestion de projet le plus adapté à ses besoins et contraintes. Par exemple, une équipe travaillant sur un projet de recherche fondamentale nécessitant une grande créativité et une forte capacité d’innovation pourrait opter pour une approche Agile PM. Cela leur permettrait de s’adapter rapidement aux changements et d’itérer sur leur travail en continu, favorisant ainsi l’innovation et la créativité.

En revanche, une équipe travaillant sur un projet de recherche appliquée nécessitant une forte coordination avec des partenaires externes pourrait préférer une approche plus structurée telle que PRINCE2. Cela leur permettrait de mieux gérer les risques et les changements dans un contexte plus complexe.L’important est de trouver le mode de gestion de projet qui convient le mieux à chaque équipe de recherche, en fonction de ses objectifs, de ses contraintes et de ses spécificités. En voici quelques exemples :

Le MACOP (Model of Attitudes toward Conducting a Project) est un modèle qui met l’accent sur les facteurs individuels, organisationnels et techniques qui influencent la conduite de projet. Il s’agit d’un modèle qui a été développé dans le domaine de l’ingénierie et qui a été adapté pour la recherche scientifique.

Le modèle MACOP est basé sur l’idée que la réussite d’un projet dépend de la manière dont les individus impliqués dans le projet perçoivent et appréhendent les différents aspects du projet. Le modèle identifie cinq dimensions clés pour la réussite d’un projet : l’engagement, la motivation, la compétence, la confiance et la responsabilité.

L’engagement fait référence à la capacité de l’équipe de projet à se consacrer pleinement au projet et à travailler ensemble pour atteindre les objectifs du projet. La motivation est la capacité à maintenir une motivation constante tout au long du projet, malgré les difficultés et les obstacles rencontrés. La compétence se réfère à la capacité de l’équipe de projet à posséder les compétences techniques et organisationnelles nécessaires pour mener à bien le projet. La confiance est la capacité de l’équipe de projet à avoir confiance en elle-même et en ses capacités à réussir le projet. Enfin, la responsabilité est la capacité de l’équipe de projet à être responsable de la réalisation du projet et à prendre des décisions en conséquence.

Le modèle MACOP est particulièrement utile pour les équipes de recherche pluridisciplinaires, car il permet de mieux comprendre les différents facteurs qui influencent la conduite de projet et d’adapter la gestion de projet en conséquence. Il permet également de mettre en lumière les différences entre les membres de l’équipe de projet et de mieux comprendre les interactions entre eux.

Le modèle de Williams et Samset considère que la réussite d’un projet dépend de la manière dont les conditions individuelles, sociales et organisationnelles sont gérées. Les auteurs identifient six éléments clés de la gestion de projet : la planification, la coordination, la communication, la motivation, la compétence et la culture. Chacun de ces éléments doit être géré de manière appropriée pour garantir le succès du projet.

La planification consiste à définir les objectifs du projet, les activités nécessaires pour les atteindre, les ressources nécessaires et les délais. La coordination implique la gestion des tâches et des activités de manière à atteindre les objectifs du projet. La communication est un élément clé pour garantir la collaboration entre les membres de l’équipe de projet et pour assurer une bonne communication avec les parties prenantes.

La motivation est également importante pour garantir que les membres de l’équipe restent engagés dans le projet et continuent de travailler à l’atteinte des objectifs. La compétence est liée à la qualité de la planification et de l’exécution des tâches du projet. Enfin, la culture joue un rôle important dans la manière dont les membres de l’équipe interagissent et travaillent ensemble. En intégrant ces six éléments dans la gestion de projet, les chercheurs peuvent maximiser les chances de réussite de leur projet.

Le P3M3 (Portfolio, Programme and Project Management Maturity Model) est un modèle d’évaluation de la maturité de l’organisation en matière de gestion de portefeuilles, programmes et projets. Ce modèle se concentre sur les processus et les pratiques de gestion de projet, ainsi que sur la culture de l’organisation en matière de gestion de projet. Il évalue la maturité de l’organisation dans ces domaines en fonction de cinq niveaux de maturité :

  1. Initial : l’organisation n’a pas de processus de gestion de projet formalisés.
  2. Repeatable : l’organisation a mis en place des processus de gestion de projet de base qui sont répétés pour chaque projet.
  3. Defined : l’organisation a des processus de gestion de projet standardisés et documentés qui sont suivis pour chaque projet.
  4. Managed : l’organisation utilise des indicateurs de performance pour suivre les projets et prend des mesures pour corriger les déviations.
  5. Optimizing : l’organisation utilise des données d’expérience pour améliorer continuellement ses processus de gestion de projet.

Le modèle P3M3 est souvent utilisé pour aider les organisations à comprendre leur niveau de maturité en matière de gestion de projet et à identifier les domaines où des améliorations sont nécessaires.

Le PMBOK (Project Management Body of Knowledge) est un cadre de référence développé par le Project Management Institute (PMI) qui identifie les processus de gestion de projet, les domaines de connaissance et les compétences requises pour gérer efficacement un projet. Le PMBOK met l’accent sur les neuf domaines de connaissance clés : l’intégration, la gestion des parties prenantes, le contenu, le délai, le coût, la qualité, les ressources humaines, la communication et les risques.

Le PMBOK décrit également cinq groupes de processus de gestion de projet : l’initiation, la planification, l’exécution, le contrôle et la clôture. Chaque groupe de processus est composé de processus spécifiques qui contribuent à la gestion globale du projet. En utilisant le PMBOK comme cadre de référence, les équipes de recherche peuvent s’assurer que tous les aspects du projet sont pris en compte et gérés de manière efficace.

Le PRINCE2, pour Projects IN Controlled Environments, est une méthode de gestion de projet développée par le gouvernement britannique. Il s’agit d’une approche axée sur les processus qui met l’accent sur la planification, la gestion de risques, la gestion de la qualité et la gestion des changements. Cette méthode est adaptée à la gestion de projets de toutes tailles, du petit projet à la gestion de portefeuille de projets. Elle utilise une approche basée sur les produits livrables, en se concentrant sur les résultats plutôt que sur les activités. PRINCE2 utilise également des mécanismes de contrôle pour surveiller et ajuster les projets en cours de route, en veillant à ce que les projets soient livrés dans les délais, les coûts et les objectifs de qualité fixés.

L’Association Internationale de Management de Projet (International Project Management Association) a développé un modèle de compétences pour les chefs de projet, connu sous le nom de IPMA. Ce modèle met l’accent sur les compétences nécessaires pour gérer efficacement un projet, telles que la communication, la négociation, la résolution de conflits et la gestion des risques. Le modèle IPMA est divisé en quatre niveaux de certification : niveau D (de base), niveau C (connaissance), niveau B (compétence avancée) et niveau A (excellence). Les compétences sont réparties en trois catégories : compétences techniques, compétences comportementales et compétences contextuelles. Le modèle IPMA est largement utilisé en Europe et est considéré comme une référence dans le domaine de la gestion de projet.

Dans le contexte de la recherche, le modèle IPMA peut être particulièrement utile pour les projets collaboratifs qui impliquent des équipes multidisciplinaires et internationales. Les compétences comportementales, telles que la communication et la résolution de conflits, sont essentielles pour assurer la réussite de ces projets. De plus, les compétences contextuelles, telles que la compréhension des différences culturelles et la gestion de la complexité, peuvent être cruciales pour la gestion efficace de projets de recherche impliquant des partenaires de différents pays et cultures.

Agile Project Management est une approche de gestion de projet qui se concentre sur la collaboration, la flexibilité et l’adaptabilité. Contrairement aux méthodes traditionnelles de gestion de projet qui utilisent des plans rigides, l’Agile PM met l’accent sur l’itération, la livraison de produits fonctionnels, la collaboration entre l’équipe de projet et le client, ainsi que sur la gestion de la complexité.

L’Agile PM est basé sur quatre valeurs fondamentales : l’individu et les interactions, le travail réalisé, la collaboration avec le client et la réponse au changement. Ces valeurs sont mises en œuvre à travers douze principes de gestion de projet qui comprennent des éléments tels que la livraison fréquente de produits fonctionnels, la collaboration étroite avec les parties prenantes, l’adaptation aux changements de manière itérative et la responsabilité partagée entre les membres de l’équipe de projet.

Cette approche de gestion de projet est particulièrement adaptée aux projets qui sont complexes et qui nécessitent une grande flexibilité. Elle permet également de mieux impliquer les membres de l’équipe de projet et de mieux répondre aux besoins des clients grâce à une communication régulière et une collaboration étroite tout au long du projet.

SCRUM est une méthode de gestion de projet Agile qui se concentre sur la collaboration, la communication et la livraison de produits fonctionnels en cycles courts. Elle a été développée pour aider les équipes à gérer efficacement les projets complexes en encourageant la flexibilité, l’adaptabilité et la collaboration.

SCRUM se base sur des itérations courtes appelées sprints, qui permettent aux équipes de travailler sur des tâches spécifiques en un temps limité. À la fin de chaque sprint, l’équipe doit livrer un produit fonctionnel qui peut être présenté au client. SCRUM encourage également l’auto-organisation des équipes et une communication régulière entre les membres de l’équipe.

Dans SCRUM, il y a trois rôles principaux : le propriétaire du produit (product owner), le maître de sprint (scrum master) et l’équipe de développement. Le propriétaire du produit est responsable de la gestion des besoins et des attentes du client, le maître de sprint veille à ce que l’équipe respecte les principes de SCRUM et l’équipe de développement est responsable de la réalisation des tâches et des objectifs.

SCRUM est particulièrement adapté pour les projets complexes, où les besoins du client évoluent rapidement et où une grande flexibilité est requise. Elle peut également être utilisée pour les projets de recherche, en permettant aux équipes de travailler efficacement sur des tâches spécifiques en un temps limité, tout en encourageant la communication et la collaboration entre les membres de l’équipe.

Et il y a aussi bien sûr :

  • Kanban
  • Lean Six Sigma
  • Critical Chain Project Management
  • Extreme Programming (XP)
  • Rational Unified Process (RUP)
  • Design Thinking
  • Spiral Model
  • Waterfall Model
  • PRISM
  • Dynamic Systems Development Method (DSDM)
  • ….

La liste est loin d’être exhaustive…

Les modes projets offrent une méthode de travail structurée et un cadre clair pour les équipes de recherche, ce qui peut faciliter la collaboration et la communication entre les différents membres de l’équipe. Les différents modèles de gestion de projet que nous avons présentés peuvent être adaptés en fonction des besoins et des objectifs de chaque équipe de recherche, mais il est important de garder à l’esprit qu’il n’y a pas de solution unique pour tous les projets de recherche. Le cadrage initial et la définition claire des objectifs et des attentes sont des étapes cruciales pour choisir la méthode de gestion de projet la plus adaptée.

Les modes projets peuvent également aider à optimiser le temps et les ressources en permettant de mieux gérer les délais, les risques et les coûts. En outre, la planification et la coordination des différentes tâches du projet peuvent améliorer l’efficacité et la qualité des résultats de recherche. Il est important de rappeler que la gestion de projet ne se limite pas seulement à la phase de planification, mais doit être intégrée tout au long du processus de recherche. Les modes projets peuvent donc être utilisés comme une méthode de travail continue pour améliorer la qualité et l’efficacité de la recherche.

Et si on appliquait le mode projet à notre vie de famille ? Après tout, il y a des deadlines à respecter (l’heure du dîner), des ressources à gérer (l’épicerie), des objectifs à atteindre (les devoirs à chaque soir)… Et pourtant, il n’existe pas de méthode de gestion de projet universelle pour la vie de famille ! Peut-être qu’il est temps de créer la méthode “Family PM” ? À moins que ce ne soit juste une excuse pour faire un Gantt chart de nos vacances d’été…

Références :

  • Crawford, L. et Pollack, J. (2007), “Enabling the Change: Aligning the Organization’s Culture and Project Management”, Journal of Change Management, vol. 7, n° 4, pp. 319-328.
  • Global Alliance for Project Performance Standards (GAPPS) (2013), GAPPS Project Manager Competency Development Framework, 2nd Edition.
  • ICB (International Competence Baseline) (2017), International Project Management Association (IPMA).
  • Project Management Institute (PMI) (2017), A Guide to the Project Management Body of Knowledge (PMBOK Guide), 6th edition, Project Management Institute, Inc.
  • Samset, K. et Volden, G. H. (2016), “Project Management for Improved Service Delivery – A Comparative Study”, International Journal of Public Sector Management, vol. 29, n° 6, pp. 533-552.
  • Williams, T. (1999), “The need for new paradigms for complex projects”, International Journal of Project Management, vol. 17, n° 5, pp. 269-273.

OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Sebastien KEIFF (23 janvier 2023). La montée en puissance du mode projet dans les équipes de recherche pluridisciplinaires : revue rapide. Le blog du papa chercheur. Consulté le 23 mai 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/snqq


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