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Science et politique : entre controverses et nécessités (3/6)

Crédit photo libre : Alex Knight

La science et la recherche sont des entreprises sociales qui ont des implications politiques, que ce soit à travers la production de connaissances ou l’implication directe des chercheurs dans les enjeux sociaux et politiques. En tant qu’acteurs sociaux, les chercheurs ont une responsabilité particulière envers la société. En effet, leur travail a un impact sur les politiques publiques, les décisions des entreprises, les normes sociales et les débats publics.

Le rôle social du chercheur est donc Important pour garantir une utilisation éthique et responsable de la science et de la recherche. Il est important que les chercheurs soient conscients de leur responsabilité envers la société et qu’ils soient prêts à s’engager dans des débats publics sur des questions scientifiques et sociales.

Cependant, l’engagement des chercheurs dans la société peut également être controversé, car cela peut être perçu comme une violation de la neutralité et de l’objectivité scientifique. Les chercheurs doivent donc être attentifs à ne pas biaiser leur recherche ou leur enseignement par des opinions politiques ou idéologiques. Ils doivent être transparents sur leurs convictions personnelles et s’assurer que leur travail est fondé sur des preuves et des faits, plutôt que sur des préjugés ou des convictions personnelles.

La question de la neutralité axiologique, c’est-à-dire l’idée que le chercheur doit être neutre et sans valeur dans son travail scientifique, est un débat important dans la communauté scientifique. Certains soutiennent que la neutralité axiologique est essentielle pour garantir l’objectivité de la recherche scientifique, tandis que d’autres affirment que cette idée est dépassée et que la recherche doit être plus engagée socialement et politiquement.

Dans tous les cas, il est important de reconnaître que la recherche scientifique n’est jamais entièrement neutre, car les chercheurs sont eux-mêmes des acteurs sociaux qui sont influencés par leur contexte social et culturel. De plus, les choix méthodologiques, les questions de recherche, les biais implicites et explicites, et les décisions éthiques que les chercheurs prennent dans leur travail peuvent tous avoir des implications politiques. Il est donc essentiel que les chercheurs soient conscients de leur rôle social et des implications politiques de leur travail, qu’ils soient ou non engagés dans des positions ou des mouvements politiques particuliers.

La spécificité des sciences humaines et sociales réside dans leur objet d’étude même : l’humain dans sa complexité et sa subjectivité. Contrairement aux sciences de la nature, les sciences humaines et sociales ont affaire à des sujets de recherche qui ont une conscience, des sentiments, des valeurs, des croyances, etc. qui peuvent influencer leur comportement et leur réponse aux stimuli. Par conséquent, il est beaucoup plus difficile pour les chercheurs de rester neutres dans leur approche, leur interprétation et leur présentation des résultats.

Cependant, cela ne signifie pas que la neutralité est impossible ou non désirable en sciences humaines et sociales. Au contraire, les chercheurs doivent s’efforcer de rester objectifs et impartiaux dans leur travail, en reconnaissant leurs propres biais et en prenant des mesures pour les minimiser. Cela peut inclure l’utilisation de méthodes de recherche rigoureuses, la vérification croisée des données, la transparence dans la collecte et l’analyse des données, et la reconnaissance des limites de leur travail.

Le but des sciences humaines et sociales n’est alors pas seulement de comprendre le monde, mais aussi de contribuer à l’amélioration de la vie et de la société. En tant que tels, les chercheurs en sciences humaines et sociales ont un rôle important à jouer en apportant des éclairages sur les enjeux sociaux et politiques contemporains.

Références :

  • Burawoy, M. (2005). 2004 Presidential Address: For Public Sociology*. The British Journal of Sociology, 56(2), 259-294.
  • Latour, B. (2004). Why has critique run out of steam? From matters of fact to matters of concern. Critical Inquiry, 30(2), 225-248.
  • Latour, B. (1991). Nous n’avons jamais été modernes: Essai d’anthropologie symétrique. La Découverte.
  • Woolgar, S. (1988). Science: The very idea. Routledge.
  • Stengers, I. (2018). Another science is possible: A manifesto for slow science. Polity Press.
  • Kuhn, T. (1972). La structure des révolutions scientifiques (2nd ed.). Flammarion.
  • Haraway, D. (1988). Situated knowledges: The science question in feminism and the privilege of partial perspective. Feminist Studies, 14(3), 575-599.
  • Pickering, A. (1995). The mangle of practice: Time, agency, and science. University of Chicago Press.
  • Collins, H. (2010). Tacit and explicit knowledge. University of Chicago Press.
  • Feyerabend, P. (1993). Against method (3rd ed.). Verso.

OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Sebastien KEIFF (25 novembre 2022). Science et politique : entre controverses et nécessités (3/6). Le blog du papa chercheur. Consulté le 23 mai 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/snqc


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